Prévoir la réversibilité des ouvrages
Le plus grand chantier de France a pris fin avec la livraison à Paris 2024 du village des athlètes par les différents promoteurs et constructeurs en charge de la réalisation des logements, espaces communs et services destinés aux sportifs. C’est une véritable ville nouvelle d’une cinquantaine d’hectares qui a pris forme en Seine-Saint-Denis, avec une particularité : la réversibilité.
En effet, le projet du village des athlètes se décompose en deux phases :
- Une première phase, dite « Jeux Olympiques », destinée à l’accueil de l’ensemble des sportifs engagés dans la compétition et de leurs accompagnants, dans des conditions dignes de l’aura de l’événement et à la hauteur de l’enjeu pour les athlètes.
- Une seconde phase, dite « héritage », qui accueillera, après réaménagements et remises en état des bâtiments utilisés pendant les JO, de nouveaux habitants et usagers de ce quartier sorti de terre à l’occasion de l’événement.
Les maîtrises d’œuvre et architectes ont dû faire preuve d’anticipation et user d’innovations pour faire de ces JO des jeux durables et éviter le syndrome de la ville fantôme post événement. Cet enjeu de durabilité et la contrainte de réversibilité générée ont été catalyseurs d’innovations.
Répondre aux enjeux climatiques
Outre l’enjeu de réversibilité, la conception et la construction du village des athlètes ont été pensées pour s’inscrire dans le contexte actuel de changement climatique. Il n’est plus question de réaliser des constructions éphémères et énergivores pour les besoins d’un événement ponctuel. Les bâtiments s’inscrivent dans le temps, avec l’enchaînement des phases Jeux Olympiques et héritage, et la transformation du village des athlètes en un quartier durable.
Les constructions répondent aux réglementations en vigueur les plus exigeantes, en premier lieu la RE2020 et s’inscrivent dans des objectifs environnementaux ambitieux, au service de la sobriété énergétique, récompensés par des labels et certifications tels BREEAM, E+C- ou encore BiodiverCity.
Tourné vers l’avenir et recherchant l’exemplarité environnementale, le chantier du village olympique a été un accélérateur d’idées et d’innovation. Arrêtons-nous sur quelques innovations générées dans les domaines du génie électrique et climatique.
Respirer un air plus sain
Assainir l’air extérieur
Récupération physique et pollution de font pas bon ménage. Situés en région parisienne, les JO sont exposés au risque de pollution de l’air aux particules fines, issues notamment du trafic automobile. Pour limiter les méfaits de la circulation sur la forme et la santé des athlètes, des dispositifs de filtration de l’air extérieur ont été imaginés.
Mis en œuvre sur la place du village des athlètes, des aérophiltres, à l’esthétique futuriste, ont pour mission d’assainir l’air extérieur du village olympique et de diminuer les taux d’ozone respirés. Connectés à Internet, ils fournissent en temps réel des informations sur les conditions atmosphériques et les niveaux de pollution de l’air. Leur principe consiste à capturer les particules fines contenues dans l’air grâce à leur ionisation et à un puissant champ électrique : on parle de filtration électrostatique.
Développés grâce au marché des JO, les aérophiltres sont l’exemple même d’une innovation encouragée par les Jeux Olympiques. Pensés dans la durée, ils permettront aux futurs habitants du quartier de faire du sport dans un environnement plus sain et aux personnes sensibles de gagner en confort de vie. Une technologie brevetée pour une première mondiale !
Améliorer l’air intérieur
La qualité de l’air intérieur n’est pas en reste sur le village des athlètes. Pour limiter l’exposition des sportifs à la pollution à l’intérieur des bâtiments, des systèmes de ventilation avec entrées d’air filtrantes ont été installés dans les chambres. La technologie employée est celle de l’e-filtration: les particules fines sont d’abord chargées électrostatiquement puis piégées par un système de plaques polarisées. Avec des résultats probants: 90%des particules supérieures à 10µm, 80% des particules supérieures à2,5µm et 77% des particules supérieures à 1µm sont ainsi filtrées. Quand on sait que certains bâtiments se situent en bordure d’autoroute, le dispositif s’avère plus que nécessaire !
Limiter le recours à la climatisation
Le contexte de réchauffement climatique soulève la question de la climatisation pour ces JO d’été. Paris est exposée à des canicules de plus en plus intenses et longues, pouvant mettre à rude épreuve les organismes des athlètes. Mais climatiser, c’est aussi réchauffer l’air et rejeter des gaz à effet de serre dans l’atmosphère ! Or, Paris 2024 se veut exemplaire en divisant par deux les émissions de gaz à effet de serre par rapport aux précédentes éditions des Jeux Olympiques d’été. Concilier les enjeux environnementaux et de bien-être ont poussé les énergéticiens à démontrer l’étendue de leurs savoir-faire et à innover.
Les bâtiments du village olympique ont ainsi été prévus sans climatisation, par souci écologique. Pour assurer le confort thermique des sportifs cet été et le confort thermique hiver comme été pour les futurs occupants, le rafraîchissement et le chauffage se feront par géothermie. Un nouveau réseau de chaleur urbain a été construit pour l’occasion, basé sur la géothermie très basse température. Ce système utilise des forages pour capter de l’eau et la rejeter à une température réduite grâce à l’utilisation de thermo-frigo-pompes. Deux circuits aller-retour composent le réseau, l’un pour la production de chaleur et l’autre pour la production de froid. Dans les bâtiments, la régulation de la température intérieure se fait par planchers chauffants / rafraîchissants, alimentés par le réseau de chaleur.
Economiser l’électricité
Les JO de Paris 2024 se veulent vitrine de l’excellence environnementale et, à travers le village des athlètes, démonstrateur de la ville durable du futur. Les consommations énergétiques des bâtiments ont été finement étudiées avec pour objectif de faire la part belle aux énergies renouvelables. Comme vu plus haut, pas de climatisation traditionnelle sur le site des JO : les consommations électriques doivent être optimisées ! Ainsi, on trouvera en toiture des bâtiments du village olympique un véritable champ de panneaux photovoltaïques. Les toitures des futurs bâtiments de logements ou de bureaux sont largement équipées, avec des boucles d’autoconsommation dans un souci d’optimisation des consommations électriques.
Des constructions plus spécifiques et emblématiques des JO participeront également à la production d’énergie renouvelable. Ainsi, le toit courbe de la gare routière des athlètes a été intégralement recouvert de panneaux photovoltaïques souples. L’électricité produite contribuera au bon fonctionnement du Team Processing Center, structure dédiée à l’accueil et à l’information des délégations internationales. Le centre aquatique de Seine-Saint-Denis dispose quant à lui de 5000m² de panneaux photovoltaïques en toiture et sera chauffé par la chaleur de récupération (ou chaleur fatale) d'eaux grises et de datacenters projet repose sur la récupération de chaleur pour éviter aux sportifs les coups de froid dans l'eau.
Enfin, EDF s’est engagée à fournir aux JO de Paris 2024 une électricité à 100% renouvelable. Pour attester du caractère renouvelable de l’électricité fournie lors des Jeux Olympiques, EDF a mis en place un système innovant de certification par blockchain de l’énergie utilisée. Ce mécanisme permet de tracer, heure par heure, la provenance de l’énergie fournie : les parcs éoliens et photovoltaïques producteurs émettent des certificats de garantie d’origine renouvelable de l’électricité injectée sur le réseau.
Les JO de Paris 2024,dans le contexte environnemental actuel, ont fait le choix de l’exemplarité et de l’innovation. Un beau défi pour les équipes engagées sur les chantiers et l’opportunité pour les professionnels de monter en compétences et de tester des technologies ambitieuses.
Les emblèmes des Jeux Olympiques et Paralympiques de Paris 2024 sont la propriété exclusive du CIO, de l'IPC et de Paris 2024, et sont utilisés dans le cadre strict de cet article après accord préalable du CIO.